A ma douce...


En mémoire de Romane.
Belle et intrépide Romane, tuée à l'aube de sa vie d'adulte par un homme ivre d'alcool, de vitesse et de bêtise.
http://romane16anspourtoujours.blogspot.com/2010/04/deux-hommes-en-noir.html

Comme nous manque la chaleur de ta présence, de ton rire, de ta voix. Ton intelligence, ton exigence et ton impertinence.

lundi 6 juin 2011

Des étoiles qui savent rire...

"Quand tu regarderas le ciel, la nuit, 
puisque j'habiterai dans l'une d'elles, 
puisque je rirai dans l'une d'elles, 
alors ce sera pour toi comme si riaient toutes les étoiles.
Tu auras, toi, des étoiles qui savent rire !"

Le petit prince à l'aviateur
dans Le Petit Prince d'Antoine de Saint-Exupéry



Le procès

10 mai 2011.
L'homme qui conduisait la voiture, l'homme qui vous a tués, comparaissait au tribunal correctionnel.
Tes amis, nos amis étaient là, près de nous.

L'homme a une tête de gamin. Une tête de gamin, pas d'homme. Une tête de gamin normal, des traits plutôt doux. On voudrait que ceux qui sont responsables de notre douleur fassent au moins l'effort d'avoir la tête de l'emploi. Comme dans les films. Qu'ils aient l'air de "méchants".
Il n'a pas une tête de méchant.

Mais c'est lui. Lui qui a eu dix voitures en 4 ans. Toutes des grosses cylindrées. Sa passion. Lui qui bloquait des cols avec des copains pour "faire la course" sur des routes qui sont à tous.
À son palmarès, plusieurs accidents. Dont un, le jour même de son permis, devant une école maternelle parce que, de son propre aveu, il roulait "fort". Mais sans que jamais il ne soit pris en faute. De la tôle froissée, deux voitures à l'état d'épave mais "pas vu, pas pris", pas de déclaration à son assureur et des grands-parents qui persistent à le soutenir financièrement. Un enfant "gâté".
Lui qui, ce soir là, a monté ses amis en conduisant trop vite. Ses amis ont témoigné. Ce soir là ils ont  crié parce que sa conduite leur faisait peur. Il n'a pas écouté. Ils sont arrivés sains et saufs mais ils ont refusés de se faire conduire par lui pour redescendre.  D'autant que là, il avait bu encore davantage.
Alors il était seul dans sa voiture. Seul, saoul et certain d'être un "pilote" hors pair. Et il a voulu "rendre service" en s'arrêtant vous prendre. Il roulait très lentement au début. Puis une voiture l'a doublé, alors il a appuyé. À fond. Et il continue de dire qu'il ne se souvient pas. Qu'il ne se souvient pas que vous avez crié, supplié. Puis, Alexandre l'a dit, vous vous êtes tus, vous vous êtes accrochés, attendant l'impact. Sûrs de l'accident.
Mon amour, je n'ai rien appris ce 10 mai que je ne savais déjà. J'ai entendu encore ces mots terribles. Votre peur. Vos cris. Votre silence. Et l'impact. Et le rebond de la voiture contre un arbre. Toi à l'arrière, au milieu, ta tête. Ton doux visage. Plus rien.

Mais j'avais besoin que tout cela soit entendu et examiné par la justice. Que cet homme soit enfin jugé.
Les mots "conduite criminelle", "comportement criminel" ont été prononcés à plusieurs reprises par la présidente du Tribunal.
Ce mardi 10 mai 2011, au terme de l'audience au tribunal correctionnel qui aura duré près de quatre heures, Yohan Neveu a été condamné pour homicide involontaire à 4 ans d'emprisonnement dont deux avec sursis. S'y ajoutent 3 ans de mise à l'épreuve, l'annulation de son permis de conduire avec interdiction de le repasser avant 5 ans (qui s'ajoute aux deux années de retrait passées) et une obligation de soins sur le plan psychologique.

Je suis sortie épuisée, mais avec le sentiment que la totale responsabilité du conducteur avait été  établie, que tout ce qui pouvait être dit dans le cadre de ce tribunal l'avait été. Sonnée aussi, car la peine prononcée par la procureur semble très clémente au regard de la gravité des faits. Mais je ne veux pas m'enfermer dans la colère et le ressentiment.

Je ne savais pas si il fallait en parler ici. Mais c'est fait. C'est là. Dans ton histoire de "l'après". Dans notre histoire de "l'après".